La mise à mort d'une cheminée

 Samedi matin, 7 mai 1977.  Sur le site de La Lys, il est prévu de démolir la cheminée du four Hoffman, vieille de 52 ans.
Briquetiers curieux et badauds voisins se sont rassemblés pour admirer cet exceptionnel et impressionnant spectacle : la chute d'une haute cheminée devenue inutile puiqu'une autre, nouvellement construite, la remplacera.

La toiture du bâtiment a été démontée. Les parois intérieures du four également. Il ne reste que les murs périphériques du four, à l'intérieur duquel doit tomber la cheminée.

Au pied de celle-ci, deux ouvriers spécialisés de la firme Ooms-Ittner, munis de marteaux piqueurs, attaquent la base de la cheminée à l'endroit précis  et rigoureusement calculé pour réussir l'opération.

Dans le bruit infernal du compresseur et de leurs outils percutants, ils créent une brèche de 2 m de haut sur la moitié du pourtour de la base. Les briques cassent, tombent aux pieds des ouvriers.  Les minutes s'égrainent. Les marteaux-pics ne cessent leur travail de sappe. Le trou s'agrandit, de plus en plus. Au bout de deux heures, la cheminée éventrée présente une gueule béante qui l'affaiblit. Mais la cheminée tient encore debout : en équilibre sur une moitié de sa circonférence.  L'impatience devient palpable. La prudence des spécialistes oblige une rigoureuse symétrie dans leur démolition. Attention, la cheminée peut s'écrouler d'une minute à l'autre.  Ils surveillent le bâton témoin coincé verticalement au milieu de l'entaille.  Avec nervosité, le public admire une dernière fois le goulot de la cheminée : un bel appareillage de maçonnerie en briques. Soudain, le bâton-témoin fléchit : les démolisseurs s'enfuient par l'arrière.

Un silence relatif s'installe. Tout le monde retient son souffle. Le sommet de la cheminée se met à vaciller.
- "Attention ! C'est maintenant ! "…  Le public présent recule par prudence !….  Les appareils photos se mettent à mitrailler !  Chlak, chlak !   Wouaww !…

La cheminée penche vers l'endroit prévu. Sa chute commence et s'accélère progressivement. A mi-course, à 45 °, elle se brise en deux par la résistance de l'air à son sommet.
Les énormes morceaux cylindriques s'écrasent sur le sol, dans un fracas indescriptible. Un inimaginable nuage de poussière s'élève aussitôt et envahit tout le site de la nouvelle future briqueterie, plongé durant quelques minutes dans un énorme brouillard. On ne se voit plus mais on s'entend, émerveillé et ému à la fois.

Puis, quand la poussière est retombée, le public peut s'approcher pour voir de près l'énorme amas de briques, les unes norcies par la fumée d'un demi-siècle, les autres patinées par le temps et les souvenirs.

A notre arrivée, au pied de la cheminée, un démolisseur est déjà au travail.

Il faut encore agrandir le trou. La base s'affaiblit au fur et à mesure  que les briques volent en éclats.

Soudain, un énorme craquement, la cheminée se fissure à la base, elle penche….

En chutant, elle se brise en deux !  

Opération réussie !  Elle tombe exactement là où il le fallait !

Bientôt, la poussière nous plongera dans un brouillard épais !

La cheminée n'existe plus mais le nouveau bâtiment s'approche !



















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